Violences intrafamiliales
Les violences intrafamiliales sont des violences qui interviennent au sein de la famille et du foyer. Elles sont généralement le fruit de violences conjugales (au sein du couple) mais peuvent également atteindre les enfants. Elles peuvent prendre la forme de violences verbales, physiques, psychologiques, économiques ou sexuelles.
Ces violences se caractérisent très souvent comme des comportements visant à effrayer, intimider (menaces), manipuler, humilier, culpabiliser ou blesser un autre membre de la famille.
Les incidents liés aux violences intrafamiliales sont rarement des cas isolés. Avec le temps, ils deviennent de plus en plus fréquents et graves. Ces violences peuvent mener à des blessures physiques graves, voire à la mort (par homicide ou suicide).
C’est pourquoi il est important de les repérer très rapidement, au sein de sa famille ou dans son entourage, pour les signaler et éviter les drames.
De plus, la persistance des violences intrafamiliales induit un risque de reproduction de ces violences par les enfants à l’extérieur du foyer ou dans leur vie familiale à venir. En effet, s’ils n’ont pas été pris en charge à temps, on observe très régulièrement un phénomène de reproduction des violences chez les enfants ayant vécu dans un environnement violent, une fois adulte.
Ainsi, pour briser le cercle de la violence intrafamiliale, il est important d’en parler et d’agir vite !
Victime ou témoin de violences intrafamiliales : que faire ?
Si vous pensez être victime de violence intrafamiliale, il est important d’en informer des personnes extérieures (professionnels de santé, associations, amis, etc…). Il n’est jamais simple de sortir d’une situation de violence au sein de sa propre famille, les mécanismes d’attachement et d’emprise sont souvent lourds et solidement ancrés, mais il est important d’en parler et de se faire aider par des professionnels pour en sortir.
Si vous vous sentez en danger, vous pouvez contacter le 17 pour recevoir de l’aide de toute urgence.
Si vous pensez être témoin de violences intrafamiliales dans votre entourage, vous pouvez contacter des associations spécialisées qui vous guideront dans la démarche à adopter pour porter secours aux victimes. En effet, il est très délicat d’intervenir directement, sauf en cas d’urgence vitale, car les auteurs de violences ont souvent une emprise et un pouvoir important sur les victimes.
Dans tous les cas, il est important d’agir et de ne pas rester sans rien faire face à de telles situations, des solutions existent, il en va de la santé mentale et physique des victimes.
Si vous êtes victime ou témoin de violences faites aux femmes : appelez le 3919.
Numéro accessible 24h/24 du lundi au vendredi et de 9h à 18h le week-end. L’appel est anonyme, gratuit et garantit une écoute, une information, et une orientation adaptée vers les dispositifs locaux d’accompagnement et de prise en charge. Les écoutants sont essentiellement des professionnels, juristes, psychologues et travailleurs sociaux.
Si vous êtes victime ou témoin de tous types de violences, vous pouvez également appeler le 116 006 partout en Europe.
Numéro européen d’aide aux victimes. L’appel est gratuit, partout en Europe, la ligne est ouverte 7j/7 de 9h à 19h. Ce numéro permet aux victimes d’une agression, d’un vol, d’un cambriolage, de violences physiques, sexuelles ou d’autres infractions mais également d’un accident de la circulation ou de catastrophe naturelle en Europe de bénéficier d’une aide psychologique adaptée aux circonstances, d’être informées sur leurs droits et d’être renvoyées vers les organismes de proximité compétents notamment vers les associations locales d’aide aux victimes conventionnées par le ministère de la Justice.
Que faire dans les cas d'une extrême gravité : maltraitance ou violence sexuelle ?
Si vous êtes victime ou témoin de violences mais que vous ne pouvez pas parler : envoyez un SMS au 114.
En cas d’urgence, appelez le 17 (Police secours).
Protéger son enfant malgré son obligation de respect le droit de garde de l’autre parent
Malheureusement, certains parents présentent des dangers pour les enfants (violences conjugales, incestes, maltraitance…).
Ces situations sont problématiques dès lors que le premier parent est légalement tenu de respecter le droit de visite et d’hébergement du deuxième parent. En conséquence, par exemple, si un enfant refuse de voir son père, sa mère est tenue de respecter le droit de visite et d’hébergement de ce dernier pour ne pas être condamnée pour non-représentation d’enfant.
Dans ce cas précis, la mère devra démontrer les violences subies par l’enfant et surtout, protéger son enfant en le tenant éloigné du parent violent.
Le décret n° 2021-1516 du 23 nov. 2021, en vigueur depuis le 1er févr. 2022, renforce l’effectivité des droits et de la protection accordés aux personnes, mineures ou majeures, victimes de violences ou d’infractions sexuelles commises au sein du couple ou de la famille. (I). Ainsi, cette protection se fera après avoir saisi le JAF (II).
> La protection des enfants, une priorité gouvernementale
Le Sénat a précisé que « L’enfance est au cœur de la feuille de route du Gouvernement et la lutte contre les maltraitances et les violences faites aux enfants est une priorité absolue qui exige le renforcement de l’action policière et judiciaire afin de détecter, réprimer et prévenir les violences faites aux mineurs » (Sénat. Question nº 00604, du 07 juillet 2022. Dénonciation du syndrome d’aliénation par. JO Sénat 28 Décembre 2023, p. 7136).
Dans le cadre de procédures judiciaires, le « syndrome d’aliénation parentale » (SAP) est régulièrement invoqué par l’une des parties, soit dans les situations de séparations conflictuelles impliquant des questions de garde d’enfant, soit dans les contextes de violences alléguées au sein du couple ou sur l’enfant.
Les juges refusent d’exclure le droit de visite et d’hébergement sur le seul fondement du SAP qui vise alors à discréditer la parole ou l’attitude de l’enfant à l’encontre de l’un de ses parents. Souvent, ces accusations ne sont, selon cette théorie, que la conséquence d’une manipulation de la part de l’autre parent (vengeance ou contrôle sur l’enfant). Pour autant, la notion de SAP est controversée.
Ainsi, la loi du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales permet au juge d’instruction ou au juge des libertés et de la détention de suspendre le droit de visite et d’hébergement du parent mis en examen des chefs d’infraction commise soit contre son conjoint soit contre ses enfants ou ceux de son conjoint et placé sous contrôle judiciaire (article 138-17º du code de procédure pénale).
Pour aller plus loin, la commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (CIIVISE), sollicitait la suspension des poursuites pénales pour non-représentation d’enfant contre un parent lorsqu’une enquête était en cours contre l’autre parent pour violences sexuelles incestueuses. Le Gouvernement a entendu cette préconisation et le décret du 23 novembre 2021 tendant à renforcer l’effectivité des droits des personnes victimes d’infractions commises au sein du couple ou de la famille a ainsi créé un article D.47-11-3 au sein du code de procédure pénale.
Dès lors, suivant le nouvel article D.47-11-3 précité « lorsqu’une personne mise en cause pour le délit de non-représentation d’enfant prévu par l’article 227-5 du code pénal soutient que les faits qui lui sont reprochés ont été justifiés par des violences ou toutes autres infractions relevant de l’article 706-47 commises sur le mineur par la personne qui a le droit de le réclamer, le procureur de la République veille à ce qu’il soit procédé à la vérification de ces allégations avant de décider de mettre ou non l’action publique en mouvement. En cas de citation directe exercée par la victime, il veille à ce que le tribunal correctionnel puisse disposer des éléments lui permettant d’apprécier la réalité de ces violences et l’application éventuelle de l’article 122-7 du code pénal relatif à l’état de nécessité ».
Ainsi, le Procureur de la République doit faire vérifier ces allégations avant toute poursuite pour non-représentation d’enfant. Ces avancées doivent encore être confortées par d’autres textes à venir.
Pour renforcer ce dispositif et notamment l’accompagnement civil et pénal des mineurs visés, le Gouvernement a annoncé la mise en place de mesures protectrices telles que l’accompagnement de l’enfant tout au long du processus pénal par les associations d’aide aux victimes (outre, le cas échéant, l’intervention d’un administrateur ad hoc).
A titre informatif, suivant le projet de loi, lorsque le parent est poursuivi ou mis en examen, l’exercice de l’autorité parentale et ses droits de visite et d’hébergement seront suspendus de plein droit jusqu’à ce qu’un juge aux affaires familiales statue sur le sujet. Le garde des sceaux a par ailleurs pris une circulaire le 28 mars 2023 relative à la politique pénale en matière de lutte contre les violences faites aux mineurs soulignant les impératifs de coordination entre les auteurs judiciaires et leurs partenaires afin de favoriser les signalements, de veiller au traitement diligent des procédures, de sécuriser le mineur victime tout au long du processus judiciaire.
Pour rappel, l’article 227-5 du code pénal vise un refus indu de représenter le mineur, ce qui suggère qu’un tel refus puisse être justifié et pourrait ainsi faire échapper son auteur à toute responsabilité pénale.
Le seul fait justificatif susceptible de présenter une certaine pertinence relativement à ce délit serait l’état de nécessité prévu par l’article 122-7 du code pénal : « n’est pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger, notamment pour autrui, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde d’autrui ».
Il est impératif de respecter deux conditions :
– Le danger doit être réel et imminent
– l’acte de sauvegarde doit être proportionné à la gravité de la menace.
Si un tel danger répondait aux conditions de l’état de nécessité, les tribunaux devraient en tenir compte pour relaxer le prévenu.
Néanmoins, auparavant la chambre criminelle a estimé qu’était disproportionné le refus de représentation d’enfant face à un risque d’abus sexuel de la part du père à l’occasion de son droit de visite exercé au domicile des grands-parents (Crim. 2 sept. 2004, Dr. pénal 2004, no 172, comm. Véron). A fortiori, la non-représentantion ne saurait être justifiée lorsque le danger est insuffisamment caractérisé (Crim. 3 sept. 1996, no 94-85.046 , Bull. crim. no 311 ; RSC 1997. 104, obs. Y. Mayaud . – Crim. 22 sept. 1999, RJPF 2000-3/60, p. 27), notamment en matière d’abus sexuel sur l’enfant (Crim. 26 mai 1999, no 98-83.224 . – Crim. 20 oct. 1999, no 99-80.286 . – Crim. 8 févr. 2000, no 99-83.083).
> Procédure
En cas d’urgence le juge aux affaires familiales peut être saisi en qualité de juge des référés, par les parents ou par le ministère public, sur le fondement de l’art. 373-2-8 du Code civil, en vue d’une modification des modalités d’exercice de l’autorité parentale
Lorsqu’un dossier est déjà ouvert chez le juge des enfants, avec une mesure d’investigation ou d’AEMO en cours, et que l’enfant est gravement mis en danger par le parent qui bénéficie d’un droit de visite ou d’hébergement en vertu d’une décision rendue par le juge aux affaires familiales, l’avocat ou du service en charge de la mesure sera en mesure de saisir le JAF compétent sur les modalités d’exercice de ce droit de visite et d’hébergement.
Il conviendra en revanche d’inviter le parent « gardien » de droit ou de fait à saisir au plus vite le JAF, en référé en faisant appel à son avocat, et, dans l’attente, de protéger l’enfant, soit en :
– organisant le droit de visite de l’autre parent de façon à garantir la protection de l’enfant (en imposant sa présence ou celle d’un tiers par exemple),
– refusant de remettre l’enfant à l’autre parent, de façon très provisoire et dans l’attente de l’audience devant le JAF.
Et, le cas échéant, si une infraction pénale peut être imputée à l’autre parent, de procéder à un dépôt de plainte. Si ces démarches sont entreprises, aucune poursuite pénale ne sera raisonnablement engagée par le parquet du chef de non-présentation d’enfant, la protection de l’enfant incombant prioritairement, ainsi que précédemment rappelé, aux parents.
Et en cas de refus ou d’impossibilité psychique pour le parent gardien d’entreprendre ces démarches, le parquet pourra être saisi soit par son avocat, avec son accord, soit par le juge des enfants – nécessairement informé de la situation par courrier déposé au greffe par exemple – aux fins de saisine du JAF.
En conclusion, le délit de non-représentation d’enfant ne s’oppose plus à la protection de l’enfant par le parent « gardien » ou « protecteur ».
Pour aller plus loin :
*La Circulaire d’application du décret n°2021-1516 du 23 novembre 2021 tendant à renforcer l’effectivité des droits des personnes victimes d’infractions commises au sein du couple ou de la famille et du décret n°2021-1820 du 24 décembre 2021 relatif aux mesures de surveillance applicables lors de leur libération aux auteurs d’infractions commises au sein du couple précise :
« Le traitement des procédures de non-représentation d’enfant en cas d’allégation de violences commises au préjudice de l’enfant Introduit par l’article 6 du décret du 23 novembre 2021, l’article D. 47-11-3 du code de procédure pénale du code de procédure pénale concerne le traitement des procédures de non représentation d’enfant lorsque la personne mise en cause soutient que l’absence de remise de l’enfant est justifiée par des violences qu’il aurait subies de la personne en droit de le réclamer, en ce compris les violences psychologiques subies lorsque l’enfant est exposé aux violences commises au sein du couple. Si la personne mise en cause du chef de non-représentation d’enfant allègue la commission par la personne en droit de le réclamer, de violences ou de l’une des infractions de l’article 706-47 du code de procédure pénale sur l’enfant, le procureur de la République doit ainsi faire procéder à des vérifications avant toute décision sur l’action publique concernant les faits de non-représentation d’enfant prévus par l’article 227-5 du code pénal. En outre, l’article D.47-11-3 in fine prévoit qu’en cas de citation directe exercée par la personne en droit de réclamer l’enfant, le procureur de la République veille à ce que le tribunal correctionnel puisse disposer d’éléments lui permettant d’apprécier la réalité de ces violences et l’application éventuelle de l’article 122-7 du code pénal relatif à l’état de nécessité. L’application de ces dispositions nécessite de traiter avec diligence et célérité les enquêtes ouvertes des chefs de violences sur mineur ou de l’une des infractions de l’article 706-47 commises sur un mineur dans un contexte intrafamilial, notamment au regard des conséquences qu’elles sont susceptibles d’avoir pour le droit de visite et d’hébergement à l’égard du mineur victime. »